L'aluminium : la Chine et l'exploitation des ressources africaines
Thierry Pairault
28 septembre 2016

Dans un article antérieur, je me posais la question des exportations africaines de cuivre à destination de la Chine , dans celui-ci il sera question d'aluminium.


Nous avions vu, à propos du cuivre, que la Chine en importait sous forme affinée dans des proportions qui suggéraient qu’elle favoriserait la transformation et par suite l’industrialisation des pays africains exportateurs de cuivre. En ce qui concerne l’aluminium, la situation pourrait être très différente selon les affirmations d’un journaliste et écrivain guinéen qui signe Modeste Kané (article paru dans Les Échos le 27 septembre 2016 sous le titre Le service intéressé de la Chine à l'Afrique ).

Ici le problème est que la Chine est à la fois le premier importateur mondial de minerai de bauxite et d’alumine (classe CTCI 284) mais aussi le premier exportateur d’aluminium (classe CTCI 684). En 2015, les importations chinoises de minerai représentaient 28,3% des importations mondiales tandis que les exportations chinoises de produit affiné représentaient 12,4% des exportations mondiales. Quant à la Guinée, elle est le 4e exportateur mondial de minerai (5% des exportations mondiales) derrière l’Australie (35%), le Brésil (17%) et les États-Unis (5%) ; en revanche elle n’exporte quasiment aucun minerai raffiné. Toutefois le rôle de l’Afrique dans ce secteur reste marginal pour la Chine : 1,6% des importations chinoises de bauxite et d’alumine. Le rôle de la Guinée est d’autant moindre pour la Chine que sa principale source africaine de minerai est le Ghana (72% des importations chinoises de minerai), la Guinée lui fournissant quasiment tout le reste du minerai africain. Cette situation est d’autant plus paradoxale que le Ghana n’arrive qu’au 26e rang des exportateurs avec 0,3% des importations mondiales mais ces exportations à la Chine représentent 67% de ses exportations de de bauxite et d’alumine. La position du Ghana ne signifie pas pour autant que la Chine y favoriserait la transformation sur place du minerai en produit affiné.


Source : Base de données en ligne de la CNUCED http://unctadstat.unctad.org/

 Didier Julienne, dans un article paru dans Les Échos du 14 juin 2016 , donne une analyse de la situation. Il remarque que « la bauxite la plus compétitive est celle du bassin Pacifique, elle est à la porte de la Chine et à l’inverse de celle d’Afrique elle n’endure pas le test permanent du coût du fret maritime de l’Atlantique vers la Chine », de surcroît « l’aluminium, c'est de l’électricité solide » et donc sa production se déplace vers les zones de production d’électricité à des coûts compétitifs comme la Chine ». Par suite, « flux d’exportations de bauxite vers la Chine à prix cassés, grande production et consommation d’aluminium en Chine, coût de l’électricité chinoise en baisse et hausse des exportations d’aluminium chinois ». 

Alors oui, en ce qui concerne la question de l’aluminium, on peut dire que la position de la Chine ne favoriserait pas une certaine industrialisation de la Guinée et que, pire encore, la production effrénée mais surtout excédentaire d’aluminium par la Chine renforcerait la chute des cours de l’aluminium et donc de celui de la bauxite dans des pays producteurs comme la Guinée.

Cours de l'aluminium du 15 avril 2011 au 29 septembre 2016

Source  : LME à https://www.lme.com/metals/non-ferrous/aluminium