Djibouti : la Chine, les Émirats Arabes unis et tutti quanti
Thierry Pairault

L’article de Sébastien Le Belzic À Djibouti, « la Chine commence à déchanter »  évoque l’existence d’une zone émiratie dont notre propre recherche Djibouti et les routes électroniques de la soie  publiée un jour plus tôt ne faisait pas état. Nous traduisons ici un texte qui évoque cette implication émiratie.


Extrait de « Comme Shekou[1], Djibouti : c’est par là que l’Afrique de l’Est accède à la mer » 对标蛇口 吉布提:东非,从这里入海 par Zheng Qingting 郑青亭à Djibouti pour L’Observateur économique du 21e siècle du 5 juillet 2017 qui peut être consulter ici

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Afin d'attirer les investissements étrangers dans des zones franches, le gouvernement de Djibouti a mis en place une politique d’incitations qui comprend le droit pour les entreprises d’être totalement à capitaux étrangers, de rapatrier la totalité de leurs bénéfices et de leur capital, d’être exempté d’impôt sur les sociétés et les revenus ainsi que d’autoriser une plus grande flexibilité dans l’emploi des travailleurs étrangers. En outre, Djibouti a mis en place un système de taux de change fixe entre sa monnaie et le dollar états-unien, pendant de nombreuses années, le taux de change a été relativement inchangé favorisant une stabilité des prix et de l’inflation.

Les zones de libre-échange自贸区 ne sont pas une innovation à Djibouti. Actuellement, il y a une zone qui occupe plus de 40 hectares qui a été mise en service en 2004. En 2011, elle était saturée par l’occupation de 169 entreprises venues de 39 pays et régions. La gestion de la zone  avait été confiée à une entreprise dubaïote Jebel Ali Free Zone (JAFZA).

La société mère de JAFZA est Economic Zones World qui est sous le contrôle du gouvernement émirati à travers Dubaï World qui est le plus grand investisseur émirati à Djibouti où elle a investi 800 millions de dollars. En plus de JAFZA, d’autres filiales de Dubaï World, comme DP World, DC World, Nakheel... participent activement au développement de Djibouti.

Cependant, les bonnes choses ont une fin ; les relations entre Djibouti est les Émirats arabes unis se sont brutalement fissurées. En 2014, le gouvernement djiboutien a annoncé qu’il allait retirer la concession octroyée depuis trente ans à DP World pour la gestion du terminal à conteneurs de Doraleh au motif que ce dernier [DP World] aurait soudoyé le président de la zone de libre-échange lors de l’appel d’offres de 2000. Les deux parties sont dans une impasse depuis de nombreuses années. En février 2017, la Cour [internationale] d'arbitrage de Londres a annoncé que les allégations du gouvernement djiboutien n’étaient pas fondées.

Bien que DP World puisse continuer à exploiter le terminal DCT [i.e. le terminal à conteneurs de Doraleh], il n’est plus le seul opérateur étranger à gérer un terminal commercial à Djibouti – le terminal multifonctionnel dans lequel China Merchants Ports a investi est en service depuis mai 2017. Alors que ses ors passés se ternissent lentement, les Émirats arabes unis commencent à s’intéresser à d’autres pays d’Afrique de l’Est. En l’espace d’un mois, DP World annoncé un investissement de 442 millions de dollars pour étendre le port de Berbera en Somalie et une concession de trente ans prorogeable dix ans. Ce port et celui de Djibouti ont potentiellement le même client, l'Éthiopie qui n’a pas d’accès à la mer.


Notes
[1]La zone industrielle de Shekou 蛇口, gérée exclusivement par la China Merchants, a été créée en 1979 avant même la formation de la zone économique spéciale de Shenzhen. Elle l’emblème du succès de la China Merchants et de son expérience dans la gestion des zones franches.