How Can Europe Better Contribute to Africa’s Economic Transformation in a Post-Corona Era?
CESIfo Forum, vol. 21, juillet 2020

Les investissements directs étrangers en Afrique, sont-ils vraiment utiles, aident-ils vraiment au développement ? La doxa économique libérale nous affirme que oui et postule qu’ils ont forcément un effet d’entraînement – spillover effect – tel que la croissance et le développement s’engendreraient dans des régions éloignées des pôles de développement initialement sélectionnés. L’exemple chinois montre que les résultats sont mitigés. La stratégie initialement mise en place voulait que le développement économique se propage des zones économiques spéciales (ZES) établies dans les zones côtières jusque dans les provinces les plus reculées, dont le Xinjiang et le Tibet. À l’évidence, le niveau de vie des Chinois s’est considérablement amélioré, même dans les provinces les plus pauvres. Dans le même temps, les autorités chinoises ont été obligées de constater que les effets d’entraînement étaient beaucoup plus limités qu’ils ne l’avaient espéré et que les écarts entre régions s’aggravaient dramatiquement, mais aussi que ces effets étaient tout à fait insuffisants pour que l’économie chinoise se convertisse d’une économie dépendante des marchés extérieurs en une économie tirée par son marché intérieur. Et l'Afrique, là-dedans ?

J’ai déjà eu l’occasion d’écrire que les bénéfices pour l'Afrique d’une application du modèle chinois comme le voulait la Banque mondiale et Lin Yifu risquaient d’être aussi d’être très limités, que ce soit à travers la stratégie des ZES (voir Lin Yifu, l’Afrique et le modèle chinois d’émergence ) ou celle de la croissance tirée par les infrastructures (voir China’s Infrastructure-Heavy Model for African Growth Is Failing ). Aujourd’hui, je lis un rapport publié par le CESIfo, un institut universitaire de recherche économique munichois mainstream, qui n’a donc pas la réputation de formuler des opinions hétérodoxes comme pourraient le faire en France des auteurs proches de l’École de la régulation ou de la revue Alternatives économiques . Aussi, si je n’ai pas été surpris par l’article de Carla Rhode and Tanja Stitteneder (Creating Sustainable Cooperation Strategies with Africa: A Glance at Development Aid and FDI, p. 53-57), en revanche, je l’ai été par celui d’Olivier Godart, Holger Görg et Aoife Hanley titré  Harnessing the Benefits of FDI in African Countries (p. 38-46). Visiblement ces trois derniers auteurs semblent gênés et usent d’une extrême circonspection pour exprimer leurs conclusions d’autant plus que le principal contributeur invité à cette publication est Arkebe Oqubay, un des principaux acteurs de la stratégie éthiopienne et co-éditeur avec Lin Yifu de l’ouvrage China-Africa and an Economic Transformation qui vante ses succès et oublie de les relativiser. Bref, selon Olivier Godart, Holger Görg et Aoife Hanley, le succès des ZES serait pour l’heure mitigé et il serait impossible d’évaluer l’impact réel des investissements chinois pour des raisons de « petit nombre » ! Les euphémismes auxquels ils ont recours nous laissent comprendre que la situation serait encore moins bonne. Rejoignions-nous une remise en cause des stratégies de la Banque mondiale à laquelle nous faisions allusion en écrivant Banque mondiale-Chine-Afrique : nouvelle donne  ?