L'endettement du Mali : la France entre la Chine et la Russie
Thierry Pairault

Au cours de la période 1979-2020, la structure de l’endettement extérieur à long terme public et publiquement garanti (par la suite, dette PPG) du Mali a considérablement évolué.

Le rôle des créanciers multilatéraux a considérablement augmenté, la dette du Mali à leur égard exprimée en dollars constants aux prix de 2015 a quasiment doublé entre les vingt premières années (1979-2000) et les vingt dernières années de la période (2001-2020), à telle enseigne qu’au cours de cette seconde période elle a quasiment représenté les trois quarts de la dette PPG malienne. Si les contributions de la Banque mondiale et des institutions financières africaines conservent les mêmes poids relatifs et cumulent 85% de la dette multilatérale, en revanche les institutions financières arabes et/ou islamiques ont quadruplé leurs poids et supportent 12% de créances.

En revanche, le rôle relatif et absolu des créanciers bilatéraux a considérablement diminué : le montant des créances maliennes à leur égard a été divisé par plus de deux tandis que leur poids ne représentait plus que 28% de la dette PPG dans la seconde période contre 57% dans la première. Aussi la concurrence entre pays prend-elle une autre dimension. On note le rôle éminent joué par l’URSS puis la Russie qui ont été à l’origine de près de 29% des créances bilatérales tout au long de la période devant la France (25%) et la Chine (19%). Il existe toutefois une grande asymétrie entre les deux périodes. Si la France reste le second bailleur bilatéral (mais avec un montant de créances diminué des deux tiers), la Russie partage la quatrième place avec l’Inde, tandis que la Chine caracole en tête sans que le montant de ses créances ait augmenté (toujours exprimées en dollars constants). Cette conjoncture où la France, ex-puissance coloniale, est coincée entre deux pays que le Mali reconnaît depuis les années 1960 et qui se présentent comme des alternatives est assez emblématique des relations franco-maliennes très dégradées.