Private Chinese Investment in Africa: Myths and Realities
Xiaofang Shen
World Bank / Policy Research Working Paper 6311 (February 2013)

Ce document est intéressant parce qu'il tente d'utiliser des données africaines sur l'investissement chinois en Afrique. Toutefois sa méthodologie ne va pas sans poser des problèmes d'interprétation.

  • La définition du secteur entrepreneurial privé est non standard sans pour autant adopter la définition chinoise ce qui aurait permis de confronter la réalité statistique chinoise à la pratique africaine des entreprises chinoises. Elle est au opportuniste, c'est-à-dire conçue pour servir la thèse de l'auteur. La définition adoptée ici tend de fait à fondre en une catégorie homogène des entreprises aussi différentes que, par exemple, une succursale de Huawei avec une petite boutique ouverte par un travailleur chinois qui, à la fin d'un contrat de travail, décide de ne pas rentrer en Chine. Mais il est vrai que Bloomberg classe comme entreprise privée une filiale du groupe de construction à capitaux publics China Gezhouba...
  • L'auteur à juste titre utilise une base de données du MOFCOM enregistrant des projets d'investissement mais les analyse comme s'il s'agissait de flux d'investissement. Les premiers sont des intentions comptabilisées selon leur nombre à l'inverse des seconds qui sont des réalisations comptabilisées selon leur valeur. Il est bon ici de rappeler qu'en moyenne 80% des flux d'investissement direct chinois à l'étranger sont le fait des entreprises publiques sous tutelle centrale, autrement dit 20% des IDE chinois sont le fait des autres entreprises de droit chinois qu'elles soient à capitaux publics, privés ou même étrangers. De cette remarque on en déduit le poids potentiellement très faible des entreprises effectivement privées dans l'investissement direct chinois en Afrique. Ce poids dans les statistiques d'IDE est d'autant plus faible que le montant d'un investissement est fonction du secteur de l'activité, or les entreprises privées chinoises investissent en Afrique dans des secteurs très peu capitalistiques.
  • L'auteur utilise de manière ambiguë le terme « investissement ». 
    • L'investissement direct étranger (que l'auteur étudie ici) reçoit une définition très claire qui est acceptée tant par l'OCDE, le FMI que par les services statistiques chinois. Cette définition n'inclut pas certaines formes d'investissement comme celles que pourraient effectuer des résidents chinois dans un pays africains à partir de l'épargne réalisée sur place ou grâce aux emprunts contractés à titre personnel auprès d'une banque locale. Elle n'inclut pas non plus le réinvestissement par des entreprises publiques chinoises de leurs bénéfices dans des structures ad hoc échappant au contrôle de Pékin. Et ainsi de suite... Or il est très vraisemblable que c'est une confusion entre le concept d'IDE et celui d'investissement au sens le plus large qui explique les différences que note l'auteur entre le nombre de projets chinois tel que l'enregistrent la base du MOFCOM et les services statistiques locaux qui consigne la nationalité de l'investisseur mais non l'origine des fonds investis (comme les statistiques d'IDE).
    • Il faut également noter la confusion autour de la notion d'« investissement en infrastructure ». Ce n'est pas parce qu'une entreprise chinoise participe à la réalisation d'une infrastructure qu'elle investit en infrastructure. Elle n'est que prestataire de services ; c'est le gouvernement africain - et non l'entreprise chinoise qu'il mandate - qui seul investit en infrastructure. Toujours pour revenir à la définition de l'IDE : un investissement direct à l'étranger suppose la propriété totale ou partielle de la chose pour laquelle une somme est dépensée.

 Le document peut être téléchargé à http://papers.ssrn.com/so13/papers.cfm?abstract_id=2198780